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6 novembre 2012 2 06 /11 /novembre /2012 18:40

Les huissiers jubilaient. Sa maison regorgeait d’appareils modernes.

Blandine l’avait deviné : avant leur rencontre, Guyon était couvert de dettes.

Par exemple, son ampli sept canaux avec décodeurs intégrés DTS-HD Master Audio, DTS, DTS-ES et DTS 96/24, son ampli avec le Dolby True HD, le Dolby Digital Plus, le Dolby Digital tout simple, le DPL, le DPL II et aussi le DPLIIx, et bien entendu, dirait Guyon, se fiant à la nomenclature, pour les sources haute définition, le décodage PCM 7.1, cet ampli-là, doté d’une amélioration de la dynamique des pistes audio compressées, doté d’un convertisseur N/A 24 bits/192 kHz pour chaque canal, cet ampli, avec un mode d’emploi de 1000 pages, valait 2000 €.

Il avait été acheté à crédit.

Sur la facture, le vendeur avait marqué au stylo bille paiement à crédit.

Le mac portable écran 17 pouces avec son processeur ultra cadencé à plus de 3 mégahertz dont il ne se servait pas valait au moins 3000 €.

Il avait été payé avec un crédit revolving.

Sa voiture valait 50000 €.

Guyon l’avait eue grâce à un prêt de la banque.

Guyon le lui avait laissé entendre. Cela ne lui avait rien coûté. Pour lui crédit signifiait gratuité.

Les huissiers venaient tous les jours. L’avocat de sa deuxième femme le harcelait pour qu’il règle le quart de ce qu’il lui devait au détriment des créances de sa propre cliente. L’avocat de sa deuxième femme tentait de faire croire à sa cliente que Guyon s’était arrangé pour qu’on ne puisse pas accéder à son patrimoine. Avec son armée d’avocats. Disait-il.

Il mentait.

Un an ou deux en arrière, Guyon menait une vie flamboyante (il possédait cinquante cravates), aujourd’hui ce n’était plus le cas. Plus de restaurants. Plus de boites de nuit. Plus de cigares.

Guyon connaissait un maigre sursis grâce à une bataille d’avocats.

Il ne payait plus ses pensions alimentaires. Sa fille menaçait son père par l’intermédiaire de son avocat – Guyon avait à faire à au moins quatre avocats. Sa fille comptait sur cet apport fixe pour payer son loyer à Paris. L’avocat de son ancienne épouse ne l’avait pas bien pris et avait engagé une procédure pour que la fille de Guyon se retrouve destituée de son droit à bénéficier d’une pension alimentaire.

Par le passé, Guyon se faisait un honneur d’honorer ses dettes, ne serait-ce que pour avoir le plaisir de jeter l’argent avec dédain à la figure de ses créancières. Depuis six mois, il avait changé. Ses collègues trouvaient qu’il était devenu pingre. Il ne sortait plus. Depuis six mois, son nouveau leitmotiv était d’affirmer qu’on pouvait très bien vivre, endetté jusqu’au cou et impuissant.

Blandine en doutait.

Il racontait qu’il avait mis de l’argent en réserve dans une république des Bermudes. De l’argent détourné. De l’argent que pour l’instant il ne pouvait utiliser.

Les huissiers piochaient dans son lot d’appareils modernes.

Ils le dépouillaient. Avec Blandine il partageait sa paranoïa. C’était la seule chose qu’il partageait. Il était démuni. Il n’avait plus que des chemises au col déchiré.

Blandine se le traînait comme un boulet. Les jours passés en compagnie de Guyon duraient des siècles. Sa beauté et sa jeunesse s’amenuisaient.

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